Bienvenue à la Taverne!

mercredi 12 février 2020

Préparation pratique, addendum 1 : "Dessines moi un donjon"

J'étais entrain de préparer le plan du deuxième chapitre de ma série sur La préparation pratique et je me suis fait une réflexion. Comme je le disais en conclusion la dernière fois, ce deuxième article sera principalement des conseils d'écriture. Notamment, comment étoffer une esquisse d'idée.

Cependant, Je me suis rendu compte d'un truc. On a commencé avec des conseils pour créer une aire de jeu suffisante pour un début de campagne. Logiquement, après ça vous avez pu dessinez votre première ville. Mais il manque quelque chose, non? Un lieu que toutes les villes de départ doivent contenir.

Vous voyez où je veux en venir. Ou vous avez lu le titre.

Un donjon! Il vous faut absolument un donjon!

Du coup aujourd'hui on va ressortir les crayons et le papier quadrillé et construire un donjon. Ni La Tombe de l'Annihilation, ni Le Temple du Mal Élémentaire. Un simple petit donjon que vous pourrez placer non loin de votre première ville.

A seigneur tout honneur, sachez que je m'appuie sur la règle des donjons en 5 pièces inventée par un mec plus intelligent que moi ( ce qui est assez rare pour être souligné) : Johnn Four. Bon, je vais pas faire une simple traduction. Je suis là pour vous donner mes propres conseils enrobés de mon ton exquis.


L'habit fait parfois le moine

La première chose à faire, va être de trouver un thème pour votre donjon. Le mieux, c'est de vous inspirer des tensions, des événements et des situations que vous avez construit pour votre ville. Il faut que vos joueurs puissent organiquement se diriger vers lui.

Du coup, le thème, le but et le forme de ce donjon sera dicté par ceux de votre ville de départ. Si nous reprenons l'exemple de la cité crée dans l'article précédent, nous avions une ville marchande où commençait à se créer des tenions de classes. Dans les événements, nous avions noté que le gouverneur avait des soucis avec des pirates fluviaux.

Le donjon que je vais créer pour cette ville coule de source : un repaire de pirates. Pour continuer dans le thème de la grogne populaire, je décide que le chef de ces hors-la-loi est un ancien pêcheur qui s'est rebellé contre le pouvoir et les taxes.

Gardez en tête que le donjon n'est pas qu'une phase de gameplay pur. Imbriquez le dans les situations que vous avez crée, le donjon est là aussi pour permettre de raconter une partie de l'histoire.


Peu importe le flacon tant qu'on ait l'ivresse

Y a un truc qu'il faut préciser, tout de même : votre donjon n'est pas obligé d'être... un donjon. Dans son article, Johnn Four dit :
"Each room in the five room dungeon template guides you through the stages of building a complete story. It's the story framework that matters most for great gaming.
The genre, game system, setting, character types, and other details do not matter. You can use the 5 Room Dungeon story framework for your campaign, guaranteed."
Ce qu'on pourrait traduire, dans une langue beaucoup plus belle et agréable à l'oreille que l'horrible anglois, par :
"Chaque pièce du format du donjon en cinq pièces vous guident au travers des étapes de construction d'une histoire. C'est le schéma narratif qui importe le plus pour du bon jeu.
Le genre, le système, le cadre, les types de personnages, et les autres détails n'importent pas. Vous pouvez utilisez le format du donjon en 5 pièces pour votre campagne, je vous le garantis."
 Et qu'est-ce qu'il veut dire par là, l'ami Jean Quatre? Ce qu'il veut dire,c'est que votre donjon en 5 pièces peut être tout est n'importe quoi. Depuis le donjon souterrain basique, jusqu'à une exploration de territoire sauvage. Chaque pièce représente surtout une scène.

Si je reprend l'exemple, je peux appliquer le format du donjon en 5 pièces de plusieurs manières à mon idée de repaire de pirates :

  • Un réseaux de cavernes sur les berges du fleuves
  • Un campement caché dans les profondeurs de la forêt
  • Une organisation dissimulé dans les bas-fonds de la ville
On pourrait encore en imaginer beaucoup d'autres, mais c'est pas le but de l'article. Sachez simplement qu'un donjon n'est pas forcément une tour, une crypte ou un souterrain.


Le moule à donjons en séries

Bon, il serait peut être temps que je vous l'explique ce format de donjon en cinq pièces, non?  Alors commençons tout de suite avec la première pièce : L'entrée! (Vous l'avez pas vu venir, avouez?) L'entrée avec un gardien pour être précis. Le gardien étant la raison pour laquelle personne n'a encore pu explorer l'endroit en question.

Ça peut être un monstre ou un adversaire ( un golem ou un poste de garde par exemple). Mais le gardien peut être un obstacle qui ne se résous pas par le combat : une énigme, le nécessité d'avoir en sa possession un objet particulier ou peut être que l'entrée est tout simplement bien dissimulée.

La deuxième pièce du format est soit un puzzle soit un challenge roleplay. L'important de cette deuxième pièce est qu'elle demande d'autres qualités que la première. Le but étant de changer le rythme de jeu.

Vous pouvez ralentir un peu le tempo avec un casse-tête ou mettre les qualités sociale de vos joueurs en avant en faisant de cette pièce une rencontre avec des PNJs neutre ou alliés. Cette deuxième pièce peut être, par exemple, un puzzle magique, une porte verrouillé par une IA ou une pièce avec des prisonniers.

La troisième pièce doit être une ruse ou un contretemps. Le but de cette pièce est de créer de la tension. Et de faire appel à des compétences et/ou des joueurs qui n'avait pas brillé jusque là.

Cette pièce peut être, un piège avec une trappe qui ralentit les PJs ou les renvois à l'entrée. Elle peut aussi être le lieu d'une trahison d'un alliés ou une fausse fin.

La quatrième pièce est le climax, l'apogée du donjon. C'est LE combat contre le boss. Faites tout pour qu'il soit mémorable, stratégie, terrain intéressant, répliques de série Z et descriptions grandiloquentes sont de rigueurs.

N'oubliez pas d'y intégré du roleplay : le combat aussi raconte l'histoire. Et les souvenirs les plus marquant ne sont pas ceux de blocs de statistiques.

La cinquième pièce est la récompense, la révélation ou un rebondissement. Le moment de gloire et de joie pour les PJs, vous pouvez le faire briller avec une scène roleplay ou en donnant une information qui fera énormément avancer l'histoire.

Vous pouvez aussi utiliser cette pièce comme un rebondissement pour surprendre vos joueurs et leurs PJs. Peut être que l'objet qu'il venait chercher est cassé et qu'il doivent trouver un moyen de le réparer. Ou alors peut être que le boss de ce donjon était le rival d'un ennemie encore plus puissant qui va profiter de la victoire des PJs.


Les Pirates Mauves

Pour l'exemple, et parce que ce sera surement plus claire pour certain, je vais esquisser rapidement le donjon de notre ville-type.

Première pièce : la bande de pirate se dissimule dans les égouts de la ville. L'entrée de leurs repaires se fait par l'intérieur d'une maison de pêcheur à l'aspect banal. Les PJs devront avoir mener l'enquête ou s'être fait bien voire des milieux populaire pour avoir l'information.

Deuxième pièce : en passant la trappe, les personnages arrivent dans un tripot clandestin. Les PJs devront soit socialiser avec les joueurs et les voyous, soit réussir à les manipuler. Ils pourront aussi tenter, s'ils le souhaitent, de rentrer dans le tas.

Troisième pièce : le dédales de tunnels des égouts. les PJs devront essayer de s'orienter dans les tunnels tortueux ou de trouver suffisamment d'indices pour choisir la bonne direction. Je peux me réserver la possibilité de rajouter un combat ou deux lors de l'exploration pour garder mes joueurs sur leurs gardes.

Quatrième pièce : Les personnages finissent par arriver dans le repaire à proprement parler. Selon, le type de joueurs et le genre de leurs PJs, cette pièce pourrait aussi bien être un très gros combat ou une rencontre social extrêmement importante. C'est la résolution de l'enquête et la confrontation avec le pirate leader des rebelles.

Cinquième pièce : la salle des coffres qui contient tout les trésors volés par les pirates. Pour rajouter de la tension et faire se questionner moralement mes joueurs, je rajoute des preuves que la bande aidait grandement les plus pauvres.

Voilà, je pense que vous pouvez maintenant facilement créer un donjon pour la ville de départ de votre campagne qu'on continuera à étoffer au prochain épisode.

"-A votre santé et à la revoyure!"

mardi 4 février 2020

Préparation pratique, chapitre 1 : "Prévoir l'imprévisible"

Il y a quelques semaines, à la fin de cet article je concluais en disant que j'avais encore beaucoup à dire sur l'optimisation de son temps de préparation. Et c'est le cas, j'ai beaucoup - BEAUCOUP - de chose à dire sur l'écriture et la préparation d'une campagne.

Et comme tout ce que j'ai à dire est absolument passionnant, je me suis dit que j'allais écrire toute une série d'article sur le sujet. Alors, heureux?

Si on résume ce que je disais la dernière fois, j'expliquais avec pertinence, passion et (forcément) beaucoup d'humilité pourquoi prévoir un scénario pour une session de JDR est une perte de temps. Car au mieux, c'est du temps de préparation inutile au pire c'est un moyen de mettre ses joueurs sur des rails. J'ai ensuite évoqué quelques pistes pour optimiser sa préparation : préparer des PNJs, des lieux et des situations.

Et c'est sur ce deuxième point que je vais insister aujourd'hui : Comment préparer de l'improvisation? Ou, en d'autres termes : Comment prévoir l'imprévisible?

Oui, je suis très fier de ce titre.

Précisons que je vais vous donner des conseils qui fonctionnent pour la majorité des systèmes. Et pour que cette série soit intéressante quel que soit votre jeu favori, je vais me concentrer sur les astuces d'écriture neutre. Je ne parlerai pas dans cette série d'équilibrage ou de création de blocs de statistiques, ces sujets variant énormément d'un système à l'autre.


Comment ne pas sauter sans filet

OK, ça y est. Vous avez décidé de maîtriser une campagne maison. Vous avez réunis un groupe de joueurs et fait votre session 0. Vous avez déjà plein d'idée en tête. Maintenant, il faut commencer la préparation.

En générale, c'est à ce moment là qu'on se rend compte que le boulot de créateur n'est pas d'avoir des idées. Avoir des idées, c'est facile. Maintenant, il s'agit de créer du contenu. Il va falloir poser son cul derrière un bureau et écrire.

Mais, pas de panique! Tout va bien se passer. On va faire ça par étape. La première étant de créer une aire de jeux.

Pour un début de campagne, surtout si c'est la première que vous écrivez, vous n'avez pas besoin d'avoir préparer un monde entier. Une petite ville suffit amplement, vous créerez les autres lieux plus tard, selon les besoins. Pour l'instant, ce qu'il vous faut c'est de quoi tenir une session et quelques possibilités d'ouverture pour la suite.

La première chose à faire va être de dessiner votre aire de jeux. Si c'est votre truc, vous pouvez faire une belle carte pour vos joueurs mais vous pouvez aussi faire un simple schéma que vous gardez pour vous.

Commencez par imaginer quelques lieux importants : une taverne/un bar/une cantina, le manoir du gouverneur locale, le quartier marchand, et un ou deux autres lieux dignes d’intérêts (un parc, une salle de jeux, une arène de gladiateur, un circuit, une foire,...)

Si vous ne faites qu'un schéma pour vous, ayez simplement en tête les distances approximative entre les lieux. Si vous faites une carte, il vous reste à combler les trous avec des quartiers d'habitations.

Pour l'exemple, je décide de créer une ville situé au point de diffluence d'un fleuve. La ville est dirigé par un gouverneur qui à fait bâtir son palais sur la rive opposée à la ville. Je décide qu'un temple se trouve entre les deux défluents et j'y place un clergé du dieu de la mer, des fleuves et des tempêtes. Je décide aussi que la ville est plutôt riche, voire en plein essor, je met donc au centre un grand parc. Je place ensuite le quartier marchand en amont du fleuve : le quartier le plus riche est forcément celui qui a le privilège de balancer ses ordures vers l'aval.


Voilà deux genres de schéma amplement suffisant. Maintenant, il faut peupler ces lieux.


Vivre et laisser vivre 

On ne vas pas tout de suite créer des PNJs, cela dit. On va d'abord imaginer des groupes sociaux, ou des factions si vous préférez. Le but étant de créer des groupes d’intérêts ayant leurs propres buts, ambitions et motivations et d'imaginer les rapports et altercations entre eux.

Si nous reprenons notre exemple :

  • Le gouverneur, sa cour et ses soldats représentent le pouvoir politique. Leurs principal objectif est la protection de la ville et la collecte des taxes. Ils doivent composer avec les bourgeois qui veulent plus de pouvoir et de liberté, le clergé qui veut renforcer sa mainmise sur le fleuve et les pêcheurs qui commence à s'agiter
  • Le clergé représente le pouvoir spirituel. Son objectif est de faire respecter les règles de son dogme et d'augmenter son influence sur les autres factions. Le temple doit négocier avec le gouverneur ses attributions et son indépendance et veut réguler l'utilisation du fleuve par les marchands et les pêcheurs.
  • La bourgeoisie marchande représente le pouvoir économique. L'objectif de ce groupe est d'augmenter ses profits ainsi que de gagner du pouvoir politique. Les taxes et les négociations avec l'aristocratie sont les principaux rapports avec le pouvoir séculier que la bourgeoisie entretient. Les dogmes du temple ainsi que la régulations du fleuve sont une source de problèmes pour eux mais, grâce à leurs opulence, ils s'assurent le soutien du peuple.
  • Les pêcheurs représentent le peuple. Ils souhaitent avant tout améliorer leurs niveau de vie et, si possible, survivre à l'hiver. Ils sont écrasé par les taxes du gouverneur, mais rendent hommage au dieu du fleuve par l'intermédiaire du clergé et profitent de l'essor économique de la ville faisant beaucoup d'affaires avec les marchands.

Avec ça, la ville commence à prendre de l'épaisseur et des situations et des événements commencent déjà à apparaître d'eux même.  Les rapports entre ces groupes seront une de vos principales base d'improvisation. Une fois que vos joueurs interagiront avec une faction, les autres réagiront aussi selon le rapport qu'ils entretiennent avec la première.

Après avoir finit le résumé des factions, vous pouvez alors crée quelques fiches de PNJ. Une petite dizaine suffisent amplement. Créez environ 2 ou 3 personnages par factions. Vous n'êtes pas obligé d'écrire une biographie de 500 pages par PNJ. Cependant, pour chacun d'entre eux il faudra, au moins, répondre à trois questions : Quelle est sa philosophie? Quel est le fait le plus marquant de son histoire? Quelle est sa plus grande ambition?

En répondant à ses trois questions, vous aurez déjà une très bonne idée de qui est ce personnage. En tout cas assez pour pouvoir improviser son interprétation.


Placer ses pions

Voilà, vous avez créer votre première ville, vous l'avez peuplée de différents groupes sociaux et vous avez imaginer plusieurs représentants de ces groupes. Maintenant, il ne reste plus qu'à tout mettre en place en créant des situations.

Des situations, pas des scénarios, pas des intrigues. Des situations.

C'est à dire que vous allez donner vie aux personnages, factions et lieux que vous venez de créer. Ecrivez une liste de 4 ou 5 événements, sans prévoir leurs déroulement. Je le dis une dernière fois, c'est à la table que l'histoire s'écrira!

Pour l'inspiration, appuyer vous sur ce que vous avez déjà préparer pour créer la ville. Par exemple, dans notre ville fluviale je pourrais facilement imaginer plusieurs situation telles que :

  • Les esprits s'échauffent à la taverne. Un bourgeois particulièrement charismatique tente de pousser à la révolte.
  • Un capitaine marchand est en procès au temple pour blasphème. Les prêtres l'accusent de sorcellerie, lui parle de racket.
  • Le gouverneur locale à des soucis avec des pirates fluviaux et des leaders révolutionnaires.
  • D'étranges rumeurs circulent sur un tueur en série. Cela fait plusieurs jours que des cadavres sont retrouvé égorgé dans le parc

Une fois que vous avez cette liste d’événements, esquissez chacun d'entre eux. Quelques lignes suffisent. Ecrivez simplement quels PNJs sont impliqués dans l'affaire, quelques point clefs, les idées que la situation vous évoque et, si besoin, quelques fiches d'adversaires.

N’étoffez surtout pas chaque situations maintenant! Vous auriez de grande chance de perdre votre temps. Une dizaine de lignes, une vingtaine maximum, par événement est amplement suffisant.  


Les dés sont (prêt à être) jetés

Avec ça, vous en avez assez pour jouer une première session, sans problèmes. En tout cas, vous connaissez suffisamment la ville et ses habitants pour pouvoir animer une session entière dedans. 

Vos joueurs vont pouvoir la visiter, et s’intéresser aux différents événements qui s'y déroulent. Logiquement, à la fin de la session vous saurez laquelle de ces "intrigue" potentielle les attire le plus. 

C'est à ce moment là que vous devrez étoffer l'intrigue choisi. et quand je dis "étoffer l'intrigue choisi", je ne parle pas d'écrire un scénario! Toujours pas. JAMAIS.

Mais ce sujet là, ça sera pour le deuxième chapitre.

"-A votre santé et à la revoyure!"